Kimagure OrangeRoad

 

"Au coeur du M&C"

 

par JérômeActarus

 

Le champignon de la véritéLe champignon de la véritéPeut-on vivre une aventure extraordinaire seul devant son poste de télévision ? Pour moi la réponse est oui puisque j'en ai vécu plusieurs. Mais l'une d'entre elles n'est pas comme les autres.

Tout commence en juin 1990. Sur mon écran apparaît un programme dont je reste très loin d'imaginer l'impact qu'il aura sur moi. Au début je me dis que c'est encore un dessin-animé japonais sans intérêt dont les concepteurs n'ont pas fait preuve d'imagination puisque les traits des personnages ressemblent étrangement à ceux d'un autre dessin-animé provenant du même pays mais diffusé sur une autre chaîne. À ce moment là, à mes yeux, ce programme ne mérite pas d'autre sort que celui d'être zappé. Mais étrangement je reste plus longtemps que prévu dessus. Je dirais même qu'il a fallu presque me faire violence pour faire disparaître ces images et obéir à mon premier raisonnement. Le lendemain, je retombe dessus. Entre temps j'ai appris que le titre est Max et compagnie. Après quelques instants, j'exécute la même manoeuvre que la veille à l'aide de ma télécommande.

Le champignon de la véritéTrois semaines plus tard, le destin me remet encore face à ce dessin-animé. Se produit alors en moi un effet indescriptible qui pourrait être comparé à une sorte de coup de foudre. Ce jour-là, je suis devenu un pur fan de Max et compagnie, totalement convaincu d'avoir affaire à une grande œuvre de télévision. L'épisode vu ce jour-là est Le champignon de la vérité et la scène en question est celle où Sabrina met ses bras autour du cou de Max après avoir ingurgité un morceau de champignon. Je me suis souvent demandé ce que cette scène a eu de particulier à mes yeux, comment elle a pu me révéler que ce dessin-animé renfermait de grandes qualités voire même du génie. C'est vrai que c'est un moment important de la série de part l'attitude engageante de Sabrina mais ce n'est peut-être pas un des meilleurs. J'ai beau la revoir des dizaines de fois grâce à mon magnétoscope, je n'ai toujours pas la réponse. Finalement je me dis qu'elle m'a simplement rappelé un bon souvenir avec une ancienne copine de classe.

Le champignon de la véritéLe champignon de la véritéDès lors, j'ai continué à suivre régulièrement et impatiemment tous les épisodes qui passaient. Dans les histoires et l'intrigue générale, je découvre une sorte d'interprétation particulière bien au-dessus de ce que nous donne une vision première du programme. C'est comme une sorte de scénario subliminal que, fort peu modestement, je me croyais un des rare à pouvoir déchiffrer. Derrière les événements montré de la vie de Max, Sabrina, Pamela et des autres se cache une réalité beaucoup plus complexe, une réalité capable de nous expliquer les raisons précises et logiques qui poussent tel ou tel personnage à agir, à réagir, à penser, à ressentir ou à croire telle ou telle chose de telle ou telle façon. Max et compagnie ne mérite donc pas que l'on s'en tienne à voir les événements de manière simpliste, même si cela n'empêche en rien de suivre et d'attendre le dénouement. Ce qui fait la force du programme n'est pas ce que l'on voit mais ce que l'on perçoit ou plutôt ce que les auteurs cherchent à nous faire percevoir. Des auteurs qui ont bien compris que ne pas tout dire ou tout montrer permettait à chaque spectateur de se faire un maximum de réflexion et d'aller vers une interprétation personnalisée. La série est donc faite pour des spectateurs actifs, des spectateurs qui se doivent de faire fonctionner leur boîte à neurones s'ils veulent réellement comprendre ce qui se passe. Cet effet imperceptible et rare à la télévision (pour ne pas dire unique) que j'ai appelé par les initiales du titre français : le M&C, est aussi difficile à expliquer qu'à croire. Comment s'imaginer qu'un simple dessin-animé puisse renfermer autant de qualités ? Je n'ai d'ailleurs jamais cherché à en convaincre qui que ce soit, du moins pas encore. Il est vrai que je me demande parfois si tout cela ne serait pas exagéré par mon esprit imaginatif et orgueilleux ; des doutes qui restent éphémères surtout quand je revois ou repense à un ou plusieurs épisodes. Mais peu importe si j'ai raison ou tord. Le plus important est que je sais qu'il y a autant de génie dans cette œuvre que j'ai de bonheur à la regarder. Max et compagnie ou Kimagure Orange Road est incontestablement un dessin-animé intelligent, rempli de qualités et qui enflamme toujours mon obsession de vouloir tout expliquer.

Le champignon de la véritéAujourd'hui, après des dizaines de visions des épisodes, mes interprétations peuvent prendre des proportions folles car je n'accepte l'existence d'aucune zone d'ombre dans les histoires racontées. J'en arrive à multiplier les théories et les hypothèses (parfois même contradictoires) sur chaque action, chaque événements pour aboutir à la même conclusion : rien n'a été laissé au hasard. Une des choses que l'on constate en regardant régulièrement Max et compagnie est l'impressionnant réalisme des personnages. On ne voit pratiquement jamais Max, Sabrina ou Pamela agir ou penser de façon incohérente ou contre-nature. Avec leurs défauts et leurs qualités, ils demeurent fidèles à leur caractère et à leur logique de vie. Bref ils sont "humains". Tel est le point de départ de la compréhension du dessin-animé : voir en eux des individus réels et analyser leur comportement comme des individus réels. Un exercice, a première vue, totalement inutile puisque s'agissant de personnages fictifs vivant dans un monde fictif, mais qui peut permettre d'exercer agréablement son sens de la réflexion. Et il vaut mieux exercer sa réflexion sur une histoire imaginaire que de ne pas l'exercer du tout.

Un nouveau styleEn poussant la cogitation encore plus loin, on arrive aussi à retrouver les éléments placés par les auteurs pour orienter ou désorienter les pensées du spectateur. Le but est de lui donner un maximum d'information indirecte, c'est à dire en l'obligeant à passer par un raisonnement personnel. Cette suggestion a l'avantage de toujours laisser un doute et de permettre à chacun de donner un part de lui-même dans la vision de l'histoire. Cette liberté d'interprétation n'est peut-être pas toujours bien appréciée par les spectateurs qui peuvent se retrouver frustrés de voir un certain manque de franchise dans les scénarios. C'est notamment le cas dans le dénouement de l'intrigue où la nouvelle vie de Max et Sabrina n'est pas montrée et où le sort de Pamela n'est pas réglé. En voyant cette fin, une question se pose aussitôt : oui…et après ? Comme beaucoup de fans, j'ai regardé le film faisant suite. À la première occasion, je l'ai loué dans un vidéo-club et je ne cache pas que j'en ai été déçu. Toute la trame suggérée, tout le fonctionnement cohérent des personnages, tout le subliminal, toutes les situations faisant appel à la réflexion, bref tout le M&C avait disparu (sans compter l'absence du fantastique). C'est la raison pour laquelle je n'ai jamais souhaité acheter les OAV, même si je ne refuserais en rien de les voir (je possède tout de même tous les tomes du manga). Pour moi, la série constitue une œuvre complète avec un début et une fin ; où le dernier épisode me donne plus envie de revoir le premier que de voir une suite. Finalement, la seule chose qui me manque vraiment, c'est la version originale de la série avec des dialogues le plus correctement traduit possible.

 

JérômeActarus
Avril 2001
Jeromeactarus@yahoo.fr

 


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